Pedro Pizá Nerín
Associé, Kreston Iberaudit, Espagne
Droits des propriétaires en Espagne : Les collectivités peuvent-elles interdire les locations de vacances ?
December 3, 2024
Un nouvel arrêt de la Cour suprême espagnole soulève des questions sur les droits des propriétaires en Espagne. Les locations de vacances sont devenues une tendance en plein essor, offrant aux propriétaires un moyen de tirer profit du tourisme tout en proposant aux voyageurs une alternative plus abordable et plus souple que l’hôtel. Mais ce phénomène croissant a également suscité des tensions dans les communautés résidentielles, où les voisins considèrent souvent que les locations à court terme perturbent leur tranquillité et leur vie privée.
La Cour suprême espagnole s’est récemment prononcée sur ce débat croissant en rendant un arrêt important. La question au centre de l’affaire : Une communauté de propriétaires peut-elle empêcher l’un de ses membres d’utiliser sa propriété comme location de vacances ? Pedro Pizá Nerín, associé chez Kreston Iberaudit, Espagne, discute de l’impact potentiel sur les investisseurs immobiliers en Espagne.
Modifications des droits de propriété en Espagne
La propriété d’un logement s’accompagne généralement de droits étendus : vous pouvez l’habiter, le vendre ou le louer. Mais lorsque vous vivez dans un immeuble résidentiel ou une communauté, les intérêts de vos voisins entrent également en ligne de compte. Les locations de vacances, bien que rentables pour le propriétaire, perturbent souvent le calme et la stabilité de la vie résidentielle. Ces locations amènent un flot régulier de touristes, qui ne respectent pas forcément les normes de la communauté comme le font les résidents à temps plein.
L’arrêt de la Cour suprême reconnaît cette tension. Il souligne la nécessité de trouver un équilibre entre les droits de propriété individuels et l’intérêt collectif de maintenir une atmosphère paisible et résidentielle dans les communautés partagées.
La Cour juge que les locations de vacances sont une activité commerciale
L’un des principaux arguments dans cette affaire était la nature des locations de vacances. La Cour a clairement indiqué que la location d’une propriété à des touristes n’est pas la même chose que la location à un locataire à long terme. Les locations de vacances sont temporaires par nature et s’adressent à des séjours de courte durée, à l’instar des hôtels. Ce manque de permanence, combiné au fait que les propriétés sont commercialisées à des fins lucratives par l’intermédiaire de plateformes touristiques, signifie qu’il est préférable de les classer dans la catégorie des activités commerciales.
Pour les communautés constituées de propriétés résidentielles, cette distinction est cruciale. Les résidents de ces communautés aspirent à la stabilité et à la tranquillité, un mode de vie que la rotation fréquente des hôtes peut perturber
Comment les collectivités peuvent-elles réglementer les locations de vacances ?
La décision de la Cour suprême a également clarifié la manière dont les communautés peuvent prendre des mesures contre les locations de vacances. Si les propriétaires ont des droits importants, ils ne sont pas illimités. Les collectivités peuvent imposer des règles visant à restreindre, voire à interdire, les locations de courte durée, mais il existe des conditions :
Des règles claires : Toute restriction doit être explicitement inscrite dans les règles de fonctionnement de la communauté et ne doit laisser aucune place à l’ambiguïté.
Approbation équitable : Ces règles doivent être approuvées par une majorité significative des membres de la communauté – pas nécessairement par tous, mais suffisamment pour montrer un accord général.
L’arrêt a également souligné que de telles interdictions ne sont pas automatiques. Les communautés doivent suivre les procédures adéquates pour s’assurer que leurs décisions tiennent la route devant les tribunaux.
Ce que cela signifie pour les propriétaires espagnols
La décision de la Cour donne aux communautés plus de pouvoir pour protéger leur caractère résidentiel. Si la plupart des résidents estiment que les locations de vacances sont perturbantes, ils disposent désormais d’une voie plus claire pour imposer des restrictions. Toutefois, l’arrêt rappelle également qu’il convient de suivre les procédures appropriées lors de l’établissement de ces règles. Les collectivités qui sautent des étapes ou agissent à la hâte risquent de voir leurs décisions annulées.
Pour les propriétaires qui cherchent à gagner de l’argent avec les locations de vacances, cet arrêt ajoute une couche de prudence. Louer sa maison à des touristes n’est pas toujours une option, en particulier dans les immeubles ou les quartiers où les habitants veulent rester strictement résidentiels.
L’avenir des locations de vacances en Espagne
Cette décision reflète les tensions croissantes provoquées par l’essor des locations de vacances. D’une part, elles représentent un modèle économique florissant qui profite aux propriétaires et à l’industrie du tourisme. D’autre part, elles remettent en cause l’harmonie des espaces résidentiels partagés.
Alors que ce débat se poursuit, la Cour suprême a clarifié une chose : les communautés ont le droit de fixer des limites et de protéger leur mode de vie, à condition de le faire de la bonne manière.